Démographe
THE PLOT TO CHANGE AMERICA
Mike Gonzalez
Encounter Books, USA, 13 août 2020, 264 p.
1er septembre 2020
Mike Gonzalez est senior fellow à l’Heritage's Allison Center for Foreign Policy et fellow à l’Angeles T. Arredondo E Pluribus Unum à Washington. Originaire de Cuba qu’il a quitté à l’âge de 12 ans, Mike Gonzalez a vécu en Espagne sous Franco, puis a rejoint à l’âge de 14 ans les Etats-Unis. Son enfance à Cuba l’a instruit sur la rhétorique totalitaire et ses effets, notamment lorsqu’à 8 ans il refusa de rejoindre le groupe d’élèves communistes.
Son livre, qui rappelle à bien des égards la thèse défendue par Christopher Caldwell dans son dernier livre (http://www.micheletribalat.fr/444442058), fait le récit de la montée des politiques identitaristes (identity politics), du contexte idéologique qui l’a permise et propose des solutions pour en sortir. Ces politiques ont été le fait d’une ingénierie sociale conçue dans des Etats pris de panique face aux émeutes noires de la fin des années 1960. Quand la fabrication politique de minorités commença, les tribunaux suivirent.
Si les politiques identitaristes trouvent leurs origines dans les années 1960-70, les Américains ne peuvent plus les ignorer aujourd’hui car, comme l’écrit Mike Gonzalez, « si vous ne vous y intéressez pas, les politiques identitaristes s’intéressent à vous » (p. 2). Elles sont nées d’une extension massive à toutes sortes de groupes du mouvement des droits civiques des années 1960, qui cherchait bien légitimement à en finir avec la ségrégation des Noirs.
Un danger réside dans le caractère coercitif de l’idéal diversitaire auquel il faut faire semblant de s’intéresser et qui valorise la situation d’opprimé, dont un seul groupe ne peut se prévaloir, celui du mâle blanc hétérosexuel non handicapé. « Comme Emmanuel Glodstein dans 1984 d’Orwell, il existe pour être haï » (p. 6). L’élite identitariste compte sur la création de groupes et cherche à inciter les gens à y adhérer en les appâtant avec la perspective d’une captation de fonds publics. D’où l’invention d’identités fictives et le développement de la culture du grief. Avant d’en examiner les dangers, Mike Gonzalez analyse les processus de création de nouveaux groupes identitaires (grouping) qui ont filé l’analogie avec l’expérience noire américaine, pourtant unique.
De La Raza aux Hispaniques
En 1967, Julian Samora co-fondait le Conseil du Sud-Ouest de La Raza (littéralement la race), qui devint national en 1973 (National Council of La Raza). Son but était de marier différents groupes parlant espagnol afin d’implanter des politiques identitaristes dans l’éducation, l’entreprise et le gouvernement. Pour lui, l’assimilation était le sommet de la fausse conscience. Samora, qui occupait des fonctions importantes dans les universités, fut nommé au Comité consultatif sur la population d’origine espagnole du Census Bureau pour la préparation du recensement de 1980, le 1er à inclure des catégories panethniques. Sauf lors du recensement de 1930, les Mexicains-Américains avaient toujours été classés comme Blancs. Si, à l’instar des Juifs, ils subissaient des discriminations et une ségrégation, ils se voyaient différemment des Noirs et cherchaient plutôt à devenir des Américains comme les autres. Mais, après la mobilisation de La Raza, beaucoup d’Américains ont commencé à voir les Hispaniques comme une race à part. La Californie fut le berceau de la racialisation qui a suivi et le Community Service Organization financé par Saul Alinsky le creuset de tous les changements à venir. La Fondation Ford aida beaucoup par ses financements, notamment de La Raza du Sud-Ouest qui devint plus tard UnidosUS, à l’extension du groupe des Hispaniques au-delà des Mexicains. Groupe qui finit par réunir des gens aussi différents que les Cubains de Floride et les Mexicains de Laredo au Texas. C’était une ingénierie mise en route par des élites radicales sans grand souci pour les gens qu’elles souhaitaient rassembler. Mais, petit à petit, prit forme un groupe ethnique fondé sur la victimisation et exigeant des mesures de justice compensatoire, malgré la résistance de Cubains. En 1971, les juges du tribunal de district du Texas mirent les Mexicains-Américains sous la protection de l’arrêt Brown v. Board of Education. En 1976, une loi définit ce qu’était un Hispanique (seule loi raciale de l’histoire des États-Unis) non à partir de la race ou la langue mais de la victimisation. À cette époque, le Census Bureau, qui n’était pas alors acquis à l’opportunité de créer un large groupe ethnique hispanique, défendait l’assimilation et était satisfait des catégories objectives (pays de naissance et celui des parents), que le directeur de La Raza voulait voir disparaître. Finalement la bureaucratie jeta l’éponge et céda en 1977. Les catégories impératives pour l’application des droits civiques à tous les niveaux du gouvernement dont l’Equal Employment Opportunity Commision (EEOC) furent : Blancs, Noirs, Hispaniques, Asiatiques, Indiens et natifs d’Alaska. Ce ne fut pas sans résistance. Une étude du Pew Research Center de 2015 a montré que moins d’un quart de ceux qui auraient pu se déclarer comme Hispaniques le faisaient, à peu près autant que ceux qui se déclaraient tout simplement Américains. Les autres déclarant une origine nationale.
Le paradoxe asiatique
C’est Yuji Ichiola, un étudiant marxiste diplômé de Berkeley qui créa l’expression “Asian-American” en 1966 et fonda l’Asian American Political Alliance (AAPA) qui joua un rôle fondamental dans la création d’un groupe panasiatique. Tous ceux qui cherchèrent à créer un collectif panethnique asiatique dans les années 1960 étaient des marxistes durs endoctrinés par les Black Panthers. Regrouper les Chinois, Japonais, Coréens… rejoints plus tard par les Indiens et les Pakistanais, suit la même logique que la création des Hispaniques : fabriquer une base permettant de réclamer une restitution pour les injustices passées. Les activistes chinois, les Red Gards, eux-aussi se comparèrent aux Noirs afin de créer une identité asiatique-américaine rejetant l’assimilation et de consolider un groupe racial. À Berkeley, Lilian Fabros, une activiste du Front de libération du Tiers Monde, joua un rôle crucial dans l’introduction de la catégorie Asian dans le recensement et fut membre fondateur du Advisory Committee on Asian and Pacific American Population pour le recensement de 1980.
Les Asiatiques-Américains ne forment pas non plus un groupe homogène. La nouvelle génération de Chinois et d’Indiens[1] (qui constitue le gros des troupes) s’est volontiers assimilée et les plus éduqués d’entre eux se joignent volontiers à l’élite Woke dans le « white bashing », ce qui leur donne l’impression d’en être. Mais l’affirmative action a créé une incitation à s’organiser en groupe panasiatique. Les Indiens, qui avaient peur d’être assimilés à des Noirs ou à des Hispaniques, voulaient le beurre et l’argent du beurre : être classés comme une minorité, sans se voir accolé le bas statut social d’un groupe indésirable, alors qu’ils détiennent le plus haut revenu médian par ménage, double du revenu médian de l’ensemble des ménages américains. Mais c’est maintenant que la farce tourne au tragique, au moins pour les enfants d’origine chinoise, coréenne et indienne. Leur succès scolaire les désavantage alors que leurs parents ont réussi grâce à leurs efforts personnels et leurs usages culturels. Et Harvard pratique aujourd’hui avec eux plus ou moins ce qu’il faisait avec les Juifs dans les années 1920. Mais, en 2017, un groupe d’étudiants asiatiques a porté plainte via l’association SFFA (Students for Fair Admission). Ils ont fait appel après que le tribunal de Boston a donné raison à Harvard, considérant qu’Harvard ne cherchait pas intentionnellement à donner un avantage à d’autres groupes et que, de toute façon, c’était provisoire pour obtenir la diversité sur le campus. Des parents luttent contre les tentatives de Bill de Blasio de casser neuf lycées publics sélectifs qui admettent « trop » d’Asiatiques par un processus neutre racialement. Des plaintes ont été portées dans le Maryland contre une modification des critères d’admission dans des Middle School Magnet ayant entraîné un fort déclin des admissions d’Asiatiques. Mais tout ceci ne plaît guère à l’AAJC (Asian Americans Advancing Justice-Asian Law Caucus), subventionnée par la Fondation Ford, qui souhaiterait, finalement, désagréger le groupe panethnique pour montrer que certains Asiatiques ne réussissent pas si bien que cela. L’AAJC ne veut pas entendre parler de minorité modèle, notion qui met à mal la théorie de la domination par les Blancs.
Echec de justesse de la création de la catégorie MENA (Middle-East, North Africa)…
Deux mois avant la présidentielle de 2016, l’Office of Management and Budget (OMB) proposa de créer, pour le recensement de 2020, une nouvelle catégorie ethnique regroupant Arabes et Perses, pourtant catégorisés comme Blancs depuis 1909, et de faire des Hispaniques/Latinos un groupe racial. Les descendants d’origine arabe ou perse ont pourtant plutôt bien réussi et ne demandent rien de tel. Mais, pour les activistes, c’est un enjeu de pouvoir politique que l’assimilation contrarie. Linda Sarsour était opposée à ce qu’on puisse se déclarer MENA et Blanc en même temps, car cela nuirait à l’attribution de fonds spécifiques. Mais la réunion de l’OMB montra qu’il n’y avait pas que des coureurs de subventions et de places, mais aussi des professeurs de la théorie critique et des études identitaristes dont le but 1er était de transformer l’Amérique et de détruire toute perspective de melting pot. Linda Sarsour et d’autres voulaient déblanchir deux millions d’Américains, au nom d’une idéologie qui encourage la dépendance aux subventions gouvernementales. Roberto Ramirez, directeur du Census Bureau, était plutôt favorable à cette innovation déclarant que, certes l’identité MENA n’existait pas encore, mais que rien n’existait avant d’avoir été créé. Finalement, il fit marche arrière en 2018.
… Mais succès pour faire des femmes une classe d’opprimés
C’est aussi une élite néo-marxiste et postmoderniste cherchant à transformer l’Amérique qui milita, derrière Kate Millet, pour faire des femmes une classe opprimée. Pour Millet et ses adeptes, les femmes n’étaient pas seulement une classe opprimée, mais LA classe opprimée dans la guerre des classes. Millet créa en 1966 la NOW (National Organization for Women) visant l’élimination des discriminations et ne se priva pas de dresser des analogies avec les Noirs et les autres catégories officielles. La NOW obtint en 1971 que les femmes fussent ajoutées à la liste des minorités nécessitant une action. Elle gagna, comme les autres (La Raza…), avec peu de membres et peu de connexions avec la base. Mais la 3ème vague féministe qui arrive avec les années Clinton va remettre en cause les acquis en contestant l’existence même d’un sexe biologique. L’idée que le sexe et le genre sont des constructions sociales ont miné l’idée d’une identité féminine. L’addition, dans certaines villes, des entreprises dirigées par des LGBTQ au Supplier Diversity Program, réduit les avantages qui revenaient aux autres. Le discours selon lequel tout est socialement construit a mis les femmes dans une position difficile, notamment sur la chirurgie du changement de sexe. Judith Butler y est par exemple opposée parce que cette chirurgie suppose un optimum du corps. Idem pour le mariage homosexuel qui conforterait l’hétéronormativité. Comme la nécessité de faire la révolution est toujours là, Mike Gonzalez s’attend à ce que le prochain combat porte sur le polyamour.
Les fondations marxistes des politiques identitaristes
Les penseurs qui ont théorisé la manière de prendre le pouvoir subrepticement par des moyens culturels proviennent des deux pays dans lesquels la révolution marxiste a échoué et qui se sont tournés vers le fascisme. La notion gramscienne d’hégémonie culturelle a été essentielle à la progression de la gauche américaine. Si la lutte des classes est internationale, elle doit prendre des déguisements nationaux pour renverser tout le système occidental. L’Ecole de Francfort a attiré des psychanalystes tels qu’Eric Fromm et Willhem Reich et opéré une synthèse entre le marxisme et le freudisme. Nombre de ses membres quittèrent l’Allemagne nazie pour l’Amérique et leur influence se fit sentir dès les années 1940, notamment via l’industrie du cinéma. Ils montrèrent un mépris pour l’Américain moyen qui rappelle celui des élites urbaines et académiques d’aujourd’hui pour l’Amérique profonde. Contrairement à beaucoup d’autres, Marcuse, l’ancien assistant de Max Horkheimer, est resté aux États-Unis après la guerre, pendant laquelle il avait fait un court passage à l’OSS, et a enseigné dans diverses universités (Harvard, Columbia, Californie…). Il devint, dans les années 1950 et 1960, « le gourou de la nouvelle gauche ». L’Homme unidimensionnel (1964) s’est vendu à 100 000 exemplaires en 5 ans aux Etats-Unis. L’influence de Marcuse sur les étudiants se retrouve chez les enseignants d’aujourd’hui. Sa protégée, Angela Davis, qui fit de la prison au début des années 1970 pour son rôle dans le meurtre d’un juge et reçut le prix Lénine de l’Allemagne de l’Est, est aujourd’hui un professeur émérite de l’Université de Californie Santa Cruz. Elle reste un guide pour des milliers d’Américains. Les postmodernistes des années 1970 et 1980 partagent beaucoup de dogmes avec l’Ecole de Francfort, mais dans un langage un peu différent. En 1998, Alan Sokal et Jean Bricmont définissaient le postmodernisme comme « un courant intellectuel caractérisé par un rejet plus ou moins explicite de la tradition rationaliste des Lumières, par des discours théoriques déconnectés de tout empirisme et par un relativisme cognitif et culturel qui ne voit dans la science qu’une “narration”, un “mythe” ou une construction sociale parmi d’autres » (p. 144). Kimberlé Crenshaw, avec son concept d’intersectionnalité, peut se féliciter d’avoir porter le postmodernisme de la théorie à la pratique.
Pour Mike Gonzalez, l’implication communiste ne fait aucun doute, comme en témoigne les propos de Robert Shrank, ancien communiste et responsable du programme de la Fondation Ford dans les années 1970 et 1980, selon lesquels la Fondation était mue par un anticapitalisme tenu secret. De même, Saul Alinski déclara dans Play Boy en 1972 : « celui qui vous dit qu’il était engagé dans les causes progressistes de cette époque et n’a jamais travaillé avec les rouges est un sacré menteur » (p. 149).
L’argument démographique et le rôle central du recensement
D’après une étude de 2018, le petit groupe le plus à gauche, formé par les enfants de Gramsci et de Marcuse, est composé très massivement de Blancs de haut niveau éducatif. Pour l’emporter, il leur faut convaincre différents groupes ethno-raciaux de leur malheur afin d’éviter l’attrition ethnique et exploiter leurs griefs à des fins politiques.
Le recensement est l’instrument vital de la mise en œuvre des politiques identitaristes. En 2019, le politologue Ruy Teixeira cosigna un rapport sur les changements politiques à attendre de l’évolution démographique déjà décrite dans son rapport de 2002. Avec de plus en plus de diplômés et de moins en moins de Blancs, le vote Républicain allait diminuer. En 2016, Richard Alba avait pourtant mis en doute les conclusions de Ruy Teixeira et montré comment le Census Bureau se faisait l’instrument du durcissement des catégories ethnoraciales en reclassant systématiquement les cas ambigus dans les minorités pour produire, notamment, l’estimation la plus faible possible des Hispaniques blancs. Ce qui rappelle étrangement la “one drop rule”. Le Census Bureau se trouve dans les griffes d’un lobby pro-racial (comprenant des universitaires) qui a fait du recensement un instrument politique. Avant, le recensement était la prérogative de la communauté des chercheurs et professeurs d’université. Il est devenu le lieu d’influence d’organisations d’activistes en faveur de la création de groupes au cœur des politiques préférentielles dont la perspicacité a été, dans les années 1960-1970, de chercher à étendre à différents groupes les programmes conçus pour les descendants d’esclaves. Pourtant, malgré les injustices et les discriminations, la plupart des immigrants ont longtemps vu l’assimilation sous un angle positif.
Une remise en cause des droits
Les postmodernistes et adeptes de la théorie critique ont généré une véritable industrie de consultants extérieurs tout particulièrement dans le domaine de l’éducation. Ainsi, en 2019, Richard Carranza, chargé du département de l’éducation à New York a ordonné aux proviseurs, directeurs d’écoles et cadres divers de suivre une formation obligatoire pour éradiquer la suprématie de la culture blanche et les biais implicites supposés rampants dans les écoles de New York. Mike Gonzalez voit dans cette victimisation généralisée, non seulement un grand malheur pour l’éducation des enfants, mais aussi une justification pratique à une intervention toujours plus grande de l’État, au détriment des droits. On retrouve ici la thèse de Christopher Caldwell. Ainsi, la Constitution, pointilleuse sur les clauses d’égalité de traitement, doit être ignorée parce que le racisme est structurel. La liberté de conscience est mise à mal car elle contrarie l’expérimentation sociale en matière sexuelle. La liberté d’expression aussi. Toute défense de ce que la pensée postmoderniste appelle le récit hégémonique est jugée toxique et devrait donc être illégale parce qu’elle retarde le démantèlement de la structure actuelle du gouvernement. Autre droit mis à mal, le droit de propriété, marotte des marxistes. Mais c’est le concept même de droits qui est attaqué. Le déni des droits naturels qui fondent le pays n’est pas qu’une question théorique, écrit Mike Gonzalez. Il a des conséquences dans la vie réelle réduisant la liberté individuelle, notamment sur les campus où les idées conservatrices sont éliminées.
Cette évolution a suscité des critiques, chez les Libéraux et les Conservateurs. Les Nationaux conservateurs insistent sur un nationalisme civique promouvant une solidarité indifférente aux caractéristiques ethnoraciales quand des Libéraux à l’ancienne, qui s’opposent aux politiques identitaristes, en sont venus à défendre la souveraineté nationale et notamment le contrôle des frontières. Mike Gonzalez penche du côté de ces Libéraux de la vieille école qui voient dans les politiques identitaristes une trahison des droits civiques de 1964 et un retour à la doctrine « séparés mais égaux ».
Le développement de la culture victimaire a, par réaction, enhardi le petit noyau suprémaciste. Comme l’écrit Heather Mac Donald, « si la “blancheur” est considérée comme un sujet légitime du discours académique et politique, il se trouvera des individus pour adopter “l’identité blanche avec fierté”» (p. 192). Surtout si l’on fait des hommes blancs des parias livrés à la colère et à la frustration. Le statut de victime (et non les capacités individuelles), nouvelle façon d’acquérir un statut moral mais aussi des dédommagements financiers, nourrit les revendications victimaires. Ce que certains à droite appellent « les jeux olympique de la victimisation ». Les demandes de soutien des opprimés n’émanent pas tellement des gens les plus démunis, mais plutôt de la jeunesse gâtée des Campus américains, la minorité Woke.
Que faire ?
Mike Gonzalez espère une mobilisation des Démocrates et des Conservateurs qui se posent des questions et s’inquiètent du tournant pris avec les politiques identitaristes pour arrêter le processus et regagner une cohésion perdue. La première chose à faire, écrit-il, est de couper la pompe financière en cessant de distribuer des avantages à ceux qui se revendiquent victimes du seul fait de leur appartenance à un groupe protégé. Ce qui revient à considérer que le handicap est fixé à la naissance et à recréer un système de castes contraire aux titres VI et VII des droits civiques qui prohibent la discrimination selon la race, la couleur, la religion, le sexe et l’origine nationale. D’après un rapport du Congressional Research Service de 2011, il y avait 264 agences dédiées aux politiques préférentielles et 276 programmes préférentiels, en augmentation de 60 % par rapport à 1995. Mike Gonzalez propose d’actualiser une telle étude, sous la responsabilité de l’exécutif, de démanteler tous ces programmes et de voter une nouvelle loi sur les droits civiques interdisant toute politique préférentielle. Neuf États ont déjà banni l’affirmative action. C’est aux citoyens de se mobiliser pour que ce bannissement s’étende à d’autres États. Louer la diversité ethnique à l’Université, c’est considérer les étudiants comme des ambassadeurs de leur groupe d’après leur ADN. Mike Gonzalez espère que la plainte des étudiants asiatiques contre Harvard ira jusqu’à la Cour suprême et que cette dernière renversera la jurisprudence actuelle en interdisant, notamment, tout usage du « disparate impact » (effet disproportionné) à l’Université et ailleurs. Cette notion, qui prend appui sur les résultats du recensement, induit des redécoupages électoraux sous la supervision de la justice. La chercheuse Abigail Thernstrom a appelé « a new entitlement », ce nouveau droit qui consiste à élire un député de son groupe ethnoracial. Un autre angle d’attaque est l’incohérence et l’artificialité des groupes panethniques aux contours variables selon les universités. C’est, plus généralement, dans l’éducation que la tâche est immense. La pensée dominante aujourd’hui est que l’enseignement traditionnel ne ferait qu’accentuer le racisme institutionnel qui privilégie la classe des oppresseurs. D’où l’implantation de pédagogies critiques, comme le Cultural Responsive Teaching (CRT) qui enseigne tout, y compris les maths, en fonction des catégories ethnoraciales des élèves. Son groupe ethnoracial déterminerait la manière d’apprendre d’un élève et devrait déterminer ce qu’il apprend. Jay Schalin préconise que législateurs et gouverneurs fassent le ménage dans les conseils de direction. Ils contrôlent les cordons de la bourse et peuvent transformer les exigences, la gouvernance des écoles et les pratiques de leur personnel et interdire qu’on apprenne aux enfants à haïr leur pays. De même, à l’Université, si le ministère de l’éducation ne peut décider de ce qui s’y enseigne, il peut exiger, sous peine de perdre les subventions publiques, une diversité d’opinions du corps enseignant.
Mais ces transformations n’ont quelque chance de se concrétiser que si les citoyens américains prennent conscience de l’ornière dans laquelle est tombé leur pays et décident de l’en sortir. Les politiques ne s’y engageront que si les électeurs et des leaders d’opinion se font entendre sur le sujet. Le mouvement des droits civiques 2.0 ne sera pas tâche facile compte tenu des avantages acquis. C’est aux citoyens d’agir.
[1] Il s’agit ici des citoyens de l’Inde.
Derniers commentaires
28.11 | 10:40
À mon avis à la Doc de l'Ined sur le campus Condorcet ou à la BNF
27.11 | 23:14
Cette période de baisse étant due à la crise de 1929 (avec des effets sur l'emploi à partir de 1932) et à la 2e guerre mondiale.
27.11 | 23:13
Selon l'INSEE, la part des immigrés et des enfants d'immigrés augmente en France depuis 1911 (2,7%) jusqu'en 2021 (10,6%).
La seule période de baisse a été de 1931 à 1946.
27.11 | 22:57
Bonsoir
Où peut-on lire l'étude sur Crulai?